Le spatial contribue à faire évoluer les pratiques de suivi de la qualité de l’eau et de pilotage environnemental de chantiers en mer par des stratégies novatrices basées sur la donnée satellite.
A partir des archives satellitaires, il est possible de reconstituer une base de données historique de certains paramètres de la qualité de l’eau (turbidité, concentrations en matières en suspension, en chlorophylle-a,…) avec une profondeur temporelle pouvant aller jusqu’à 20 ans.
Exploitée conjointement avec les paramètres de forçage météo et hydrologiques (vent, vagues, marée, débit fluvial pour l’essentiel), il devient possible de caractériser un état initial, c’est-à-dire les climats de turbidité et d’activité phytoplanctonique prévalentes en zone littorale et côtière, à distance, et sans déploiement de sondes sur le terrain !
C’est un avantage indéniable tant pour les opérateurs de travaux maritimes que pour les autorités environnementales et gestionnaires d’aires marines protégées qui disposent d’une ressource dense et gratuite pour approfondir la connaissance du fonctionnement hydro-sédimentaire littoral et évaluer la dynamique biologique naturelle, hors situation de travaux.
Les données satellitaires utilisées pour reconstruire des archives temporelles de paramètres de la qualité de l’eau sont celles du programme Copernicus (Sentinel-2/3 depuis 2015) et de la NASA (MODIS, depuis 2002). Elles sont téléchargées, traitées en produits MES/turbidité/chlorophylle et analysées pour en extraire les climats de turbidité et d’activité phytoplanctonique moyens et extrêmes (statistiques mensuelles, saisonnières, percentiles 95, 99,…).
2018
Année de mise en service
8
Nombre de réalisations
Le Port Atlantique de La Rochelle a été le premier acteur portuaire français à s’approprier ce produit en 2018. La motivation originelle du Port résidait dans un besoin de connaissance plus fine de la dynamique hydro-sédimentaire complexe des Pertuis Charentais et aux abords de la zone portuaire. Les résultats obtenus ont notamment permis d’obtenir des cartographies du bruit de fond turbidité (composante naturelle de la turbidité) et de venir y superposer les simulations de dispersion des sédiments au point de rejet (composante anthropique) réalisées par modélisation par ACTIMAR, aboutissant à une évaluation de la turbidité totale en situation de travaux.
Ce premier cas d’étude avec le Port de La Rochelle a reçu la reconnaissance de la communauté portuaire française avec le prix Numérique à Port du Futur 2018 (Nicolas Ménard, PALR et Aurélie Dehouck, i-Sea sur la photo ci-contre).
Deep Turbi est une fonctionnalité novatrice, issue de notre R&D, de prédiction des niveaux de turbidité naturelle littorale et côtière qui permet un meilleur pilotage des enjeux de qualité de l’eau et de maitrise de la turbidité pendant les travaux portuaires. Le module, sorte de météo de la turbidité à 3 jours, fournit des prédictions en temps réel. On peut choisir sa zone d’intérêt, sélectionner les spots sur lesquels on souhaite une remontée d’infos, soit autant de sondes de turbidité « virtuelles » sur la zone chantier et ses abords.
On n’a plus besoin de faire de compromis sur les sites à instrumenter in situ. On peut choisir une stratégie duale, en concentrant le dispositif de surveillance in situ sur les secteurs les plus sensibles où les enjeux de préservation de la qualité de l’eau sont les plus forts, et doter tous les secteurs secondaires du dispositif Deep Turbi.
Deep Turbi, c’est la capacité de prévoir le dépassement des seuils de turbidité, on gagne en anticipation, on sait quand et où la turbidité risque d’être excessive, et on peut ainsi optimiser le planning de travail des dragues tout en veillant au respect des contraintes environnementales.
2020
Année de mise en service
1
Nombre de réalisation
Deep Turbi a été développé avec le soutien de l’Agence Spatiale Européenne dans le cadre d’un financement ESA Business Applications (2019-2020). La Région Occitanie a été la première à l’expérimenter dans le contexte des travaux d’extension du port de Port-la-Nouvelle qui ont fait l’objet de dragages en grande masse à l’hiver 2020/2021.
Le module Deep Turbi pluggé à la plateforme de gestion de données environnementales de SINAY pour le compte de la Région Occitanie a permis de compléter le dispositif de surveillance et d’anticiper les alertes susceptibles d’arrêter le chantier.
Benjamin Grente revient sur les bénéfices du satellitaire et de l’application Deep Turbi dans cette interview.
i-Sea est engagé depuis 2021 dans le programme MedEOs de l’Agence Spatiale Européenne (ESA Mediterranean Regional Initiative – volet Coastal water quality) aux côtés de DEIMOS, Telespazio France, SUEZ Rivage Pro Tech, KartEco, …. MedEOs se donne pour objectif de développer de nouveaux produits satellitaires de la qualité de l’eau (turbidité, chlorophylle-a, oxygène dissous, eutrophisation, blooms d’algues toxiques) dont l’originalité tient à la revisite quotidienne et à la haute résolution spatiale. Une première année d’activité a permis de développer et tester des méthodes de fusion de données appliquées aux données et produits Sentinel-2/3 et d’évaluer leur précision à l’échelle de sites pilote dans 4 régions méditerranéennes (France, Espagne, Tunisie, Egypte). La prochaine étape est la démonstration à l’échelle des zones côtières méditerranéennes.